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jeudi 4 avril 2013

Mariage pour tous : Et les enfants ?

Sur Facebook (encore !), une de mes collègues m'a envoyé l'information suivante : France 5 a diffusé le 2 avril dernier (mardi soir) un reportage de52 minutes sur le mariage pour tous, ou plutôt sur les enfants au sein des familles homoparentales.
Merci Sylvie pour l'information, je me suis bien entendu empressée de visionner ce reportage. Ma connexion internet a planté à la 39e minutes, mais c'est sans importance, tant le message délivré par ce reportage est clair et limpide.
Il FAUT légaliser la situation de ces enfants !!! C'est une évidence bien sûr !

Bon alors au-delà du message lui-même (sans équivoque), je vais quand même tenter, malgré les 11 minutes qui manquent à mon visionnage, de décrypter ce que j'ai vu dans ce documentaire, parce que c'est quand même très intéressant d'y réfléchir à tête reposée.

Tout d'abord, ce que je tiens à préciser, c'est que le reportage est à charge contre les opposants au mariage homosexuel, et forcément en faveur des personnes favorables à ce projet de loi. Il n'y a pas photo : dans les termes employés, dans les images montrées, dans le montage, dans le choix des personnes qui témoignent, tout est orienté en faveur des « couples » homosexuels. On sait donc très vite où on met les pieds (c'est sans doute l'avantage de ce type de reportage orienté).

Sur le reportage lui-même maintenant. Tout d'abord, ça commence par une vision idyllique de plusieurs familles homoparentales qui se regroupent pour, selon l'un des hommes interviewés, « que leurs enfants sachent qu'ils ne sont pas les seuls à vivre cette situation ».
On peut y voir plusieurs choses bien sûr et interpréter ces dires de différentes manières.
Premier cas : il faut que les enfants se sentent le mieux possible dans ces familles, donc il faut leur dire que leur situation est « normale ».
Deuxième cas : Nous avons besoin de nous retrouver entre nous, parce qu'à l'extérieur, c'est terrible, nous sommes persécutés, il faut donc rassurer nos enfants et leur montrer que non, nous ne sommes pas des anormaux, et que tout va bien.
Je sens déjà les reproches sur cette seconde interprétation, mais c'est vraiment l'impression que ça m'a donné : « Les pauvres homosexuels sont franchement persécutés, jusque dans leur désir d'enfant et leur parentalité, c'est vraiment, vraiment choquant et inadmissible. »

Ensuite, on rencontre plusieurs familles homoparentales, un couple de femmes, un couple d'hommes, des grands-parents d'un enfant élevé par un autre couple de femmes. On rencontre également un jeune homme homosexuel qui est soutenu par sa famille qui vit l'homosexualité du fils au quotidien, qui suit de près les débats sur le « mariage pour tous » et les manifestations des opposants à la télévision.

On rencontre aussi Elisabeth Roudinesco, qui est elle aussi favorable au projet de loi, ainsi qu'une juriste qui explique en quoi le droit est fait pour aller contre la nature, parce que la nature est cruelle et que le droit permet de rééquilibrer les choses. Soit.

Ah oui, on voit aussi un tout petit peu Tugdual Derville, porte-parole d'Alliance Vita, mouvement opposé au « mariage pour tous », et quelques militants dans la rue tentant de mobiliser le péquin moyen sur cette question. On voit aussi quelques images de la manifestation du 13 janvier à Paris.
On voit aussi beaucoup d'images sur les manifestations des homosexuels réclamant les mêmes droits que les hétérosexuels, mais pas seulement : il y a des images d'archives de la première Gay Pride aux USA, des images des rafles à l'encontre des homosexuels dans les années 50...

L'impression, là, sur le vif, que me laisse le début du reportage, c'est que les personnes qui ont tourné et monté ce document présentent sans le dire les homosexuels en victimes de la société, sur le mode : « Vous vous rendez compte ? On a voulu les mettre en prison pour leur orientation sexuelle ! L'OMS en a fait des malades mentaux, et maintenant, on leur refuse le droit de se marier et d'avoir des enfants ! Non mais quelle honte !!! »
Bien sûr, ce n'est pas dit de cette manière, mais les images laissent penser, et donnent à penser que oui, vraiment, les pauvres homosexuels sont des personnes comme tout le monde qu'on a martyrisées de tout temps et qu'il est vraiment temps que cela change.

La suite, cette série de reportages-interviews de parents homosexuels, que l'on voit dans leur vie quotidienne, dans leur cadre familial, montre deux ou trois familles épanouies, avec de jeunes enfants (3 ans pour les uns, 6 ans pour les autres), qui répètent aux caméra que si, leurs enfants vont bien, qu'ils sont normaux, qu'il n'y a aucun problème, qu'il n'y a pas confusion possible parce que ces enfants savent qu'ils ont deux papas et une femme qui leur a donné la vie, ou bien deux mamans et un « papa-graine » quelque part.
C'est tellement beau, c'est tellement harmonieux, que ça donnerait presque envie de le vivre aussi. Chouette, ça a l'air idyllique, d'avoir deux papas ou deux mamans, et surtout sans aucun problème ! Alors ça, ce n'est pas tout à fait vrai (toutes mes excuses, je vais trop vite) : il y a quand même un gros problème : « En cas de décès d'Ingrid [la maman biologique], je [la compagne de la mère] ne suis pas protégée. Ils ne sont pas protégés non plus. »
Ben oui, ça, pour le coup, c'est quand même un gros souci, un vrai problème. Mais bon, que voulez-vous, ma pov'dame ! Le désir d'enfant, c'est tellement fort, hein !

Alors là, je crois que je commence à comprendre ce qui ne va pas dans ce « débat » de société. C'est tout simplement que les « pro » et les « anti » « mariage pour tous » ne parlent pas du tout de la même chose. Et c'est sans doute aussi pour cette raison que les positions des uns et des autres sont totalement irréconciliables.

Dans ce reportage, on voit clairement des adultes, parents d'enfants bien sous tous rapports nous expliquer qu'ils aiment ces enfants, que ce n'est pas du tout un problème pour eux de s'occuper des enfants, de les aimer, de les éduquer, de leur expliquer la vérité, même à trois ans, etc. Et que donc si les « anti » ont peur que les enfants n'y trouvent pas leur compte, c'est ridicule et que ça dénote simplement qu'ils ont peur de ce qu'ils ne connaissent pas. Je suppose donc que les auteurs du reportage se sont donné pour mission de combler cette lacune des « anti mariage pour tous » en leur prouvant par A+B que :
1- l'homophobie c'est pas bien
2- qu'il n'y a pas que les hétérosexuels qui sont aptes à s'occuper d'enfants
3- que les enfants sont moins bien protégés par la loi dans ces « familles » que si les parents étaient mariés, et que donc,
4- il faut absolument donner le droit aux parents homosexuels de se marier. Oh pas pour eux, ils s'en foutent clairement. Non, pas pour eux, mais pour protéger les enfants. Parce que ce sont eux qui comptent avant tout, bien sûr !

Alors là, il y a quelques petites choses avec lesquelles je suis parfaitement d'accord :
1- l'homophobie, non, ce n'est pas bien. L'homophobie, c'est la peur irrationnelle de l'homosexualité et donc, par ricochet, des homosexuels. Et cette homophobie conduit au rejet, à la mise au ban de la société, et donc à la discrimination (qui veut dire traiter différemment deux choses pourtant semblables [quoique, là, il y a matière à discussion, mais bon]).
2- Il n'y a pas que les hétérosexuels qui sont aptes à s'occuper d'enfants. Bien entendu. Évidemment. Cela va de soi, dirais-je même. Ce n'est franchement pas compliqué de changer une couche ou de donner un biberon, de faire à manger pour les enfants, même quand on est un homme, de transmettre des valeurs à un enfant, de lui donner de l'affection, de lui raconter des histoires pour l'endormir ou encore de lui faire un câlin au moment du coucher. Heureusement que ça, ce n'est pas une question d'orientation sexuelle ! Ce serait quand même un comble que des personnes normales (parce que je ne pense pas que les homosexuel(le)s soient des personnes anormales ou porteurs de « tares » comme j'ai vu certains de mes contacts sur FB me soupçonner de le faire) ne puissent pas s'occuper d'enfants du seul fait qu'ils préfèrent coucher avec quelqu'un du même sexe plutôt qu'avec quelqu'un du sexe opposé. C'est un argument tellement évident qu'il en devient, pour moi, quasiment ridicule...

En revanche, les points 3 et 4 me semblent plus sujets à caution.
Pour ce qui est de la protection des enfants, le fait que les paires d'homosexuels ne soient pas mariés ne pose dans le droit pas vraiment de problème, pas plus en tout cas que dans le cas des familles qui ont vu la disparition de l'un des parents (père ou mère décédé par exemple) ou dans le cas des enfants nés hors mariage. Dans tous les cas, les enfants ont droit à la même protection, ce n'est pas une question de sexualité ou de statut marital des parents, mais bien de protection de l'enfance. Rien à voir, donc.
Ah si, bien sûr : en cas de décès de la mère ou du père biologique, que se passe-t-il ? On peut supposer, puisque l'enfant n'est pas le fils ou la fille biologique du compagnon ou de la compagne du parent décédé, qu'il n'a pas de droits et que l'enfant sera donc confié plutôt à ses grands-parents s'il en a encore, ou bien à une famille d'accueil si ses grands-parents ont disparu ou sont inconnus (dans le cas d'un enfant conçu par don de sperme ou d'ovocyte anonyme, ou encore par mère porteuse). Sauf que je crois bien qu'il existe, dans le droit français, un principe qui s'appelle « l'intérêt supérieur de l'enfant », qui veut qu'on examine la situation de l'enfant et que le juge prenne la décision la plus favorable à l'enfant lui-même et non pas aux adultes qui l'entourent. Ce qui veut dire qu'il y a des dispositions dans le code de la famille en particulier qui protègent l'enfant et lui permettent de vivre avec la personne qui l'élève, quand bien même cette personne n'aurait pas de lien biologique avec lui. Et puis, il y a la possibilité pour le parent biologique de déléguer l'autorité parentale à un tiers, pour faciliter la vie quotidienne, donc cela ne pose aucun problème pour l'enfant.
En fait, ce qui pose problème, ce n'est pas que l'enfant ne soit pas protégé dans le cas du décès de son parent biologique, mais bien que le conjoint du parent biologique, lui, n'ait pas la garantie de se voir confier la garde des enfants qu'il (ou elle) élève avec le parent biologique. C'est donc un problème d'adultes, et non pas de protection de l'enfant, il me semble. Et encore, même là, je doute que ce soit réellement un obstacle, compte-tenu des aménagements légaux qui ont déjà été accordés par la justice à ces parents, justement pour résoudre ces casse-tête juridiques que sont les familles homoparentales. Les enfants n'étant pas responsables des choix et de la vie sexuelle de leurs parents ou des personnes adultes qui vivent avec eux et les élèvent, le droit a prévu des solutions dans ces cas-là, toujours dans l'intérêt de l'enfant. Il y a donc fort à parier que si une mère biologique meurt dans un accident de voiture, par exemple, la garde effective des enfants reviendra de fait à la personne qui a élevé les enfants depuis leur naissance (si le couple a tenu jusque-là), quand bien même cette personne serait la compagne homosexuelle de la mère décédée. Je ne vois donc pas où est la question de la protection, que ce soit celle de l'enfant ou celle du compagnon ou de la compagne du parent biologique...

Pour le point 4, j'ai déjà évoqué en partie la question, relative notamment à la protection de l'enfant. Pour le reste, le mariage, les couples interrogés ici semblent s'en taper royalement. D'ailleurs, l'une des femmes le dit très bien : « Si on obtient le droit de se marier, on planifiera le mariage, et aussi le divorce, parce que nous avons la tête dure ».
Ça veut dire quoi, ça ? Si je comprends bien, ça veut dire simplement que le mariage « protégeant » le conjoint et les enfants tant qu'il dure, il faut avoir le droit de se marier, mais que du coup, le mariage est considéré comme une simple formalité accordant des droits supplémentaires. Comme il est aussi assorti de devoirs auxquels on n'a pas forcément envie de se soumettre, alors il reste la solution du divorce. Est-ce que par hasard, la femme qui a dit ça se rend compte qu'en divorçant, elle « perd » aussi les droits patrimoniaux que lui accorde le mariage ? Qu'elle se retrouve alors dans la situation de tous les couples divorcés qui doivent a priori s'organiser pour la garde des enfants (garde alternée, garde exclusive, pension alimentaire...) ? Ou bien est-ce que c'est de la provocation pour dire simplement que le mariage, elle s'en fiche totalement, et que sitôt obtenu le droit de se marier, elle usera de ce droit, mais que ça ne changera strictement rien, à tel point qu'elle pourra divorcer de sa compagne sans aucune conséquence pour elles ni pour les enfants ? Que leur vie continuera exactement comme avant ? Mais quelle hypocrisie !

Bien sûr, elle fait ce qu'elle veut de sa vie... et notamment de sa vie de couple. Mais s'il y a bien quelque chose qui me pose problème ici, c'est le manque de logique. On réclame un droit, mais pour s'empresser de le mettre aux oubliettes ?
Et on voudrait nous faire croire, à nous, personnes opposées à l'ouverture du mariage aux homosexuels, que ça ne changera rien à la définition du mariage ?

Pour ce qui est du mariage, encore, si, bien sûr que ça change la définition du mariage. Le mariage, dans le dictionnaire, c'est l'union d'un homme et d'une femme en vue de procréer. Comme c'est impossible pour deux femmes ou deux hommes de procréer ensemble, par définition, soit leur union ne peut pas être appelée « mariage », soit il faut changer la définition du mot « mariage » pour faire entrer les couples homosexuels dans cette définition. Ce qu'on peut tout à fait faire, mais alors qu'on arrête de nous dire que ça ne change rien, puisque ça change la définition même du mariage. Il faut être un minimum cohérent.
On nous répond que ça n'enlève pas de droits aux couples hétérosexuels. Soit. Encore que. Pour ma part, ça me fait quand même bizarre de me rendre compte que le contrat conclu avec mon mari il y a douze ans, par le mariage civil, n'aura pas la même teneur que celui que mes enfants concluront peut-être un jour, mais surtout que celui que mes contemporains concluront après la promulgation de la loi (si la loi est effectivement adoptée définitivement), et ce seulement 12 ans après le mien. Quelle est la valeur de mon propre mariage, si l'État en change la définition en cours de route ? (je précise qu'il s'agit d'un simple questionnement, je me trompe peut-être !).
En tout cas, si, ça change quand même quelque chose, en ce sens que ça change le sens de la filiation aussi. Parce qu'il faut quand même, à un moment ou à un autre, arrêter de croire tout ce qu'on nous dit : dans la mesure où le mariage induit la procréation, il induit aussi la filiation. Si la définition du mariage change, alors la filiation change aussi. En autorisant le mariage pour les personnes homosexuelles, on dit aussi : « la filiation biologique, c'est de la fiction, ce qui prime, c'est la filiation sociale, celle qui est issue d'un projet parental. » Alors bien sûr, dans le cas des couples hétérosexuels, les deux concordent (filiation biologique et filiation « sociale »). Mais ce n'est pas le cas dans les couples homosexuels, où la filiation biologique est simplement impossible. Il faut donc changer la définition de la filiation. Dans l'interview de douze minutes qui suit le reportage, une juriste à l'initiative de la lettre cosignée par 170 juristes alerte sur le changement de sens de la filiation induit par le mariage pour tous : puisqu'il ne s'agit plus de procréation mais d'éducation (comme on l'a vu plus haut, les couples homosexuels ne sont pas plus « manches » que les hétérosexuels pour éduquer les enfants), alors n'importe qui, n'importe quel éducateur pourra se prévaloir de cette qualité pour demander à obtenir le statut de parent de l'enfant. Ce ne sera plus uniquement ceux qui élèvent l'enfant, mais aussi l'éducateur du périscolaire, la tante chez qui il va jouer le mercredi, la nourrice à qui l'enfant est confié, la grand-mère qui va le chercher à l'école, le soir, etc. Même si c'est sans doute un peu tiré par les cheveux, ce n'est pas totalement absurde quand même. Tout simplement parce qu'il n'y a pas de raison de limiter la délégation d'autorité parentale à une seule personne. Et il n'y a pas non plus de raison, ça existe déjà ailleurs, de limiter le nombre de parents à deux personnes.
De ce fait-là, le « mariage pour tous » déstructure bien la famille, comme le craignent les opposants à cette loi, en supprimant les repères essentiels à la croissance harmonieuse d'un enfant. Ou plutôt, il porte en germe cette déstructuration. Parce que bien entendu, cette conséquence ne va pas se voir immédiatement. Elle ne deviendra réalité que sur le long terme...

Alors, autre point soulevé par le reportage : les actes des « parents », qui ont été amenés à contourner la loi pour avoir la possibilité d'avoir des enfants. On a vu ce couple de femmes, « mamans » de jumeaux de trois ans, et qui sont allées en Espagne pour une insémination artificielle avec donneur anonyme pour pouvoir engendrer ces enfants.
Le couple d'hommes, quant à eux, est allé en Ukraine pour y trouver une femme qui a donné ses ovules et a porté les jumeaux, moyennant quand même 80.000 € en dédommagement. (à ce sujet, j'ai bien aimé l'intervention de Mme Elisabeth Roudinesco qui soutient qu'il ne s'agit pas de l'achat d'un bébé, mais d'un dédommagement pour la pauvre femme qui met sa vie entre parenthèse pendant neuf mois pour permettre à un couple d'étrangers d'avoir des enfants. C'est cynique. D'abord, 80.000 €, c'est une somme incroyablement importante, c'est la moitié du prix de ma maison, par exemple. Mais c'est aussi ridiculement bas quand il s'agit de vies humaines. Comment, d'ailleurs, évaluer le prix d'un enfant ? Alors là, elle dit qu'il ne s'agit pas du prix de l'enfant, mais d'un dédommagement... soit, mais alors il s'agit du dédommagement de quoi ? De neuf mois « perdus » pour cette grossesse ? Et la mienne, de grossesse, elle est rémunérée à cette hauteur-là ? Pourquoi je n'aurais pas le droit d'avoir un dédommagement aussi parce que je suis enceinte ? Ah oui ! Les indemnités journalières de la sécu ? On est loin des 80.000 €. Les prestations familiales ? Je suis sûre que le père officiellement célibataire des jumeaux y a droit lui aussi ! Et deux fois, en plus, parce que ce sont des jumeaux, donc ça se cumule !
Alors s'agit-il d'un dédommagement en cas de problème pendant la grossesse ? Non, bien sûr, puisque c'est le prix à payer par tous les couples qui ont recours aux mères porteuses en Ukraine. C'est donc un tarif de base !
Alors c'est le prix à payer pour que la femme donne l'enfant qu'elle a porté dans son ventre, et pour être sûr qu'elle ne voudra pas le garder une fois qu'il sera né, non ? C'est donc le prix de l'enfant ! Donc Mme Roudinesco est une menteuse et/ou une hypocrite...

Pour continuer sur cette question du contournement de la loi en allant à l'étranger pour une insémination artificielle avec donneur ou une mère porteuse, il y a quand même autre chose qui me choque, hormis la question financière : ces « familles » ont contourné la loi et ne s'en cachent pas vraiment (elles ont témoigné à visage découvert dans le reportage), ce qui veut dire qu'elles se sentent suffisamment en sécurité pour des « hors-la-loi » normalement passibles de peines de prison ou d'amendes quand on a enfreint ou contourné la loi française. Ce qui veut dire aussi qu'en France, quand il s'agit d'abus de bien sociaux, de fraude fiscale... on est susceptibles d'être inquiétés, mais pas quand il s'agit de la marchandisation d'enfants... Ça aussi, ça me laisse rêveuse... La loi, elle s'applique pour tous, non ? Elle est la même pour tout le monde, ou il y en a qui ont des passe-droits et qui n'ont pas à s'inquiéter des conséquences de leurs actes ? Pourquoi une telle incohérence dans le droit français ? Pourquoi, quand il s'agit du vol d'un objet, ou de détournements de fonds dans une entreprise par exemple, la loi s'applique, mais pas en matière d'enfants, de PMA ou de GPA, pourtant explicitement interdites dans le droit français ?
Notre gouvernement (mais pas uniquement le présent, je veux tout de suite rassurer les lecteurs de ce billet) est bien tolérant... parce que vu l'âge des enfants, ce n'est pas sous le gouvernement Hollande qu'ils ont été conçus, mais sous le ou les gouvernements précédents. Ce qui laisse supposer quand même une grande tolérance pour ces pratiques interdites !
Là encore, ce qui me choque, ce n'est pas que ça existe, mais l'incohérence de fond, l'illogisme de la chose. Soit c'est interdit, et alors les personnes qui enfreignent l'interdit sont sanctionnées et la loi s'applique, soit c'est interdit et les personnes ne sont pas inquiétées, et alors ça sert à quoi d'avoir des lois ?

La fin du reportage (oui, j'ai réussi à voir les onze minutes manquantes) est édifiante. On y rencontre un jeune homme de 30 ans, dont la mère a divorcé du père il y a vingt ans (l'enfant avait donc 10 ans à ce moment-là) parce qu'elle était homosexuelle. Ce jeune homme se dit « normal » en ce sens qu'il a eu dans son adolescence les mêmes questionnements que les autres enfants de son âge, sur son identité, sa sexualité, etc. La seule chose qu'il ajoute, et qui l'a sans doute blessé durant son adolescence, c'est qu'il a dû faire face au regard des autres et qu'il s'en est sorti en cachant que sa mère était homosexuelle et qu'il vivait avec deux femmes et non pas un homme et une femme. Mais qu'en dehors de ça, ça ne l'empêche pas d'être heureux, d'être épanoui, et d'être hétérosexuel (ouf, l'homosexualité n'est pas héréditaire comme les « méchants anti mariage pour tous » semblent le penser !).
Bon alors là, je me dis qu'il y a plusieurs problèmes quand même. Non pas pour ce jeune homme, visiblement bien dans ses baskets, mais par rapport au discours du reportage. Tout d'abord, les auteurs reconnaissent que les dernières études françaises datent des années 1990. Elles sont donc totalement hors-sujet pour ce qui concerne la situation des enfants vivant aujourd'hui dans les familles homoparentales (pour ceux qui sont issus de PMA et de GPA notamment), dans la mesure où ces techniques, si elles existent depuis Amandine pour la FIV par exemple, ne sont utilisées par de plus en plus de couples homosexuels que depuis quelques années seulement. Les enfants qui étaient interrogés dans ces études des années 1990 étaient donc essentiellement issus de couples hétérosexuels, et vivaient deux événements difficiles : la séparation de leurs parents biologiques d'une part, traumatisme pour tous les enfants qui vivent le divorce, quelles que soient les causes de ce divorce d'ailleurs, et l'homosexualité de l'un de leurs parents, qui ne peut pas aller sans poser de questions à l'enfant (et le jeune homme interrogé à la fin du reportage exprime clairement ces questions d'ailleurs). Donc ces études des années 1990 ne peuvent bien sûr pas être utilisées aujourd'hui, ni par les « pro » ni par les « anti » « mariage » pour tous, parce qu'elles sont biaisées et qu'elles ne correspondent pas à la réalité d'aujourd'hui.
Mais de la même manière, il est impossible de se baser sur le témoignage de ce jeune homme, aujourd'hui adulte de 30 ans, pour dire que les enfants élevés dans les familles homoparentales n'ont aucun risque d'avoir plus de problèmes que les autres (notamment des problèmes psychiques, des souffrances psychologiques, etc.), dans la mesure où ces enfants (en tout cas ceux du reportage) sont très jeunes (moins de 10 ans dans tous les cas, et pour la plupart encore dans la petite enfance). Les seules personnes du reportage qui ont l'air d'avoir conscience du problème (ou en tout cas qui en parlent) sont les grands-parents. Pour tous, « pour l'instant », il n'y a pas de problème lié à l'absence de la mère ou du père. Mais tous se posent la question de savoir ce qu'il en sera dans l'avenir, notamment à l'adolescence.
Mme Roudinesco souligne que les études menées ne servent à rien, si ce n'est à dire ce qu'on sait déjà, à savoir qu'à milieu égal, les enfants élevés dans les familles homoparentales n'ont pas plus de problèmes que ceux élevés dans les familles hétéroparentales. Et ce pour la simple raison que ce sont des familles socialement favorisées (ben oui, vous voyez, vous, deux employés au SMIC aller en Ukraine pour payer une femme 80.000 € pour avoir un bébé ?). Qu'ils vivent donc dans des milieux aisés, qu'ils sont la plupart du temps surprotégés, avec des parents plus intelligents que la moyenne, qui poussent davantage leurs enfants durant leur scolarité... bref, qui vivent mieux que la moyenne. Ce qui interroge quand même : au moment de l'ouverture du mariage pour tous à tous, les personnes homosexuelles issues de milieux défavorisés qui aujourd'hui ne peuvent pas aller en Espagne pour faire un bébé par PMA ou louer le ventre d'une femme en Ukraine se verront octroyer le droit d'avoir des enfants par ces mêmes techniques, en France. Et vraisemblablement gratuitement sur le dos de la sécurité sociale, pour ne pas créer une nouvelle discrimination par l'argent, cette fois entre couples homosexuels. Or Mme Roudinesco dit bien dans ce reportage que ce qui conduit aux problèmes psychiques, aux troubles mentaux et aux névroses... c'est essentiellement la pauvreté.
Alors là, attention. Je ne suis pas en train de dire qu'il faudrait interdire aux homosexuels pauvres d'avoir des enfants ! Sinon, pour être logique, il faudrait aussi interdire aux hétérosexuels pauvres d'avoir des enfants. Je me pose juste une question : si la situation financière des parents homosexuels protège les enfants de troubles, de névroses, etc., n'est-ce pas un peu étrange de dire « on ne peut pas se baser sur ces études parce qu'elles ne disent que des choses qu'on sait déjà, à savoir qu'à milieu comparable, les conséquences sont les mêmes ou à peu près » ? Parce qu'en creux, cela veut dire que, sachant que la pauvreté aggrave la situation (y compris mentale) des enfants qui en souffrent, on va créer volontairement des enfants qui vont cumuler un certain nombre de handicaps : à la situation pécuniaire des parents (pouvant aller jusqu'à la pauvreté) qui n'est pas de leur faute, loin de là, on va ajouter un autre problème qui est la privation délibérée, pour ces enfants, de la présence d'un père ou d'une mère, qui pourrait ajouter encore à la situation mentale difficile des enfants en question. Donc les enfants qui auront la chance de naître dans des couples homosexuels aisés (et qui donc auront aussi ce problème de la privation d'un père ou d'une mère) seront favorisés par rapport aux autres vivant dans les familles pauvres.
Vous allez me dire que c'est pareil pour les familles hétéroparentales. Bien sûr que c'est pareil : les enfants dans les familles pauvres sont forcément pénalisés par rapport aux enfants issus de familles aisées. La différence, c'est que là, on crée par la loi des situations complexes où on ajoute volontairement une difficulté qui est l'absence d'un père ou d'une mère. Certains n'y voient pas de problème majeur pour l'épanouissement d'un enfant. Encore une fois : bien sûr, puisque les parents homosexuels d'aujourd'hui sont plus favorisés socialement que ne le seront, en moyenne, les parents homosexuels de demain, après la promulgation de la loi. Mais n'est-ce pas faire un pari risqué sur l'avenir de ces enfants, alors même qu'on en connaît déjà les conséquences sur les enfants issus de familles hétérosexuelles pauvres ?

Je vais arrêter là, il y aurait d'autres choses à dire, comme la conclusion du reportage, qui se termine sur la constatation de la mère des jumeaux de 3 ans : « Ils [les opposants au mariage pour tous] vont devoir changer, parce que s'ils ne changent pas d'eux-mêmes, ils changeront forcément à cause de nos enfants. Nos enfants ne vivent pas dans des communautés fermées. Demain, nous serons les parents de Paul ou de Pierre qui invitent les leurs à venir jouer à la maison. »
J'ai juste envie de dire : Et alors ? La question n'est pas liée au mariage pour tous ni à un changement « obligé » des uns au bénéfice des autres, mais à une simple question de respect de l'autre. Ce discours de cette femme m'interpelle en ce sens qu'elle semble trouver normal d'obliger les autres (sous-entendu les hétérosexuels) à changer et à accepter l'homosexualité comme une norme. Donc on se trouve là face à un diktat imposé par une minorité à la majorité. Et pour moi, ça s'appelle simplement de l'hétérophobie...

Edit : Je trouve particulièrement malhonnête intellectuellement l'intervention de Mme Roudinesco à propos de la question qui lui a été posée sur la santé mentale des enfants élevés dans les familles homoparentales. La question était, si je me souviens bien : "Les enfants élevés dans ces familles sont-ils plus sujets que les autres aux névroses ?"
Sa réponse a été en substance que les études menées sur les enfants élevés dans les familles homoparentales ne sont pas probantes parce qu'elles aboutissent à quelque chose que l'on sait déjà : à savoir que ce qui pose problème, c'est plus la pauvreté que l'orientation sexuelle des parents. Et de faire tout un laïus sur les enfants eux-mêmes, histoire de bien noyer le poisson et de ne surtout pas répondre à la question. Parce que même si ce qu'elle dit est vrai (à savoir que les familles homoparentales sont plutôt aisées dans l'ensemble), il n'en demeure pas moins vrai qu'il existe aussi des familles hétéroparentales aisées. Donc une comparaison entre les deux types de familles est possible et a sans doute été faite. Mais on n'aura pas la réponse à la question de la bouche de Mme Roudinesco. Peut-être que la comparaison n'est pas à son goût ? Peut-être qu'elle montre qu'en moyenne, les enfants élevés dans les familles homo ont plus de difficultés que les autres ?
Allons Amélie ! Ne sois pas mauvaise langue ! Elle a peut-être simplement oublié de répondre ?
Ou bien peut-être aussi que les journalistes n'ont pas fait leur travail comme il fallait et qu'ils n'ont pas posé la question de savoir si, au sein des familles aisées, les enfants élevés par des parents homosexuels sont plus névrosés que les autres ? (Rhôô ! Amélie, tu es incorrigible ! Te voilà en train de suggérer que des gens pourraient ne pas faire leur travail correctement ? C'est pas bien !!!).
Donc nous n'en saurons pas plus...

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